Une publication exhaustive retraçant l'évolution, sur plus d'une décennie, de l'une des œuvres phares de Rossella Biscotti, centrée sur les procès des membres du mouvement de gauche révolutionnaire Autonomia Operaia au début des années 1980, théâtre judiciaire emblématique des années de plomb en Italie.
Développée entre 2006 et 2021, l'œuvre
The Trial est centrée sur le procès du « 7 avril » (1983-1984), une enquête et une affaire judiciaire historiques contre des membres du mouvement d'extrême gauche italien Autonomia Operaia. Le projet s'est déroulé à travers des installations, des sculptures, des performances, des groupes de lecture, des films et des documents imprimés, présentés entre autres au MAXXI — Musée national d'art du XXIe siècle, en 2010 ; à la dOCUMENTA(13), à Kassel, en 2012 ; à e-flux, à New York, en 2013 ; au Wiels, à Bruxelles, en 2014 ; Castello di Rivoli Museo d'Arte Contemporanea, 2024.
Le cœur du livre est la transcription en anglais d'un enregistrement audio de six heures, composé à partir de centaines d'heures d'enregistrements d'archives du procès diffusés par Radio Radicale. Édité comme un scénario théâtral, The Trial devient un récit polyphonique qui met en avant les voix politiques des accusés en opposition à la structure et au langage de la machine judiciaire : procureurs, juges, avocats. La transcription est accompagnée de textes critiques de Michael Hardt, Daniel Blanga Gubbay et
Giovanna Zapperi, ainsi que d'une conversation entre l'artiste et le philosophe Antonio Negri, l'un des principaux accusés du procès. Elle explore la manière dont la mémoire politique est transmise, traduite et incarnée à travers le temps.
À travers une documentation visuelle et des extraits multilingues de performances mises en scène dans diverses institutions et différents pays, cette publication retrace la réactivation continue de l'œuvre à travers la traduction, la collaboration et des interventions spécifiques au contexte.
The Trial résiste à toute conclusion définitive, offrant plutôt un cadre évolutif pour aborder l'histoire politique, la mémoire collective et la nature performative de la justice.
Rossella Biscotti (née en 1978 à Molfetta, Italie, vit et travaille entre Bruxelles et Rotterdam) utilise le montage comme un geste pour révéler les récits individuels et leur relation à la société tout en révélant simultanément les supports qui créent ces récits. Dans sa pratique cross-média, à la croisée du cinéma, de la performance et de la sculpture, elle explore et reconstruit les moments politiques et sociales de ces derniers temps à travers les expériences subjectives d'individus souvent posés sur fond de systèmes institutionnalisés violents En intégrant son expérience personnelle et récits oraux dans le récit de nouvelles histoires, elle entreprend la construction d'un récit officieux de l'histoire qui vit en marge du discours officiel. Utilisant souvent un site d'investigation comme point de départ, des témoignages différents voire contradictoires sont judicieusement tissés ensemble dans de nouveaux récits visuels. En examinant la pertinence de la matériau récupéré dans une perspective contemporaine, Biscotti crée des liens et des réseaux avec le présent, renforçant l'imagination, la culture et l'expérience des spectateurs.
