Decay Music n.9 – Liminale (vinyl LP)

Œuvre unique de près de 40 minutes s'étendant sur les deux faces du disque, « Liminale » – comme son titre l'indique – est une exploration du liminaire par le biais de moyens sonores : il s'agit de « lieux qui existent sur le seuil, d'espaces transitionnels suspendus entre un avant et un après, entre le réel et l'évanescent », le paysage sonore étant conçu comme « un lieu liminal, un espace à habiter sans savoir avec certitude où il mène ». Se déroulant comme un labyrinthe parcouru dans l'obscurité, la première moitié de la pièce est marquée par la sobriété et la retenue, alors que des sons et des harmoniques de guitare au rythme lent créent des silences et des ambiances résonnantes dans un espace tentaculaire, délicatement peuplé de sons microscopiques, de ponctuations fugaces tirées de sources indéterminées, de paroles et de l'apparition inattendue de sonorités de piano captivantes.
Au fur et à mesure que « Liminale » progresse dans sa seconde partie, Turra et Martusciello introduisent une dimension plus dense de l'entre-deux. Non moins définies par la présence de l'espace et du mystère, des textures discrètes bruissent et évoluent dans des passages de pure abstraction concrète, avec une approche fragmentée et étirée de la musicalité : sons longs, pulsations métalliques, vibrations infinitésimales, voix traitées, harmoniques de guitare et mélodies de piano déconstruites, enfouies dans des brumes spectrales et vaporeuses dérivant dans un paysage imaginaire et immersif d'une portée profondément méditative, où chaque élément sonore flirte avec la ligne qui sépare l'émergence de la disparition.
Intime, fragile et d'une beauté saisissante, « Liminale », la première collaboration de Luigi Turra et Elio Martusciello, est un coup de force dans l'art du son et de la composition, révélant la puissance du sens contenu dans les espaces de transition et l'indéfini, et imprégnant le silence d'une gravité et d'un poids monumentaux. Masterisé pour le vinyle par Giuseppe Ielasi, ce neuvième et avant-dernier titre dans la série Decay Music de Die Schachtel porte le minimalisme électroacoustique au plus haut degré de l'éther.