À l'invitation de Fabienne Dumont, sept femmes artistes portent leurs regards sur l'œuvre d'Alice Neel (1900-1984), figure majeure et longtemps méconnue de la peinture nord-américaine, puissante portraitiste et artiste engagée.
L'œuvre d'Alice Neel est marquée par son fort engagement politique et social. Elle réalise principalement des portraits et, à travers eux, elle peint avec réalisme toute la remarquable diversité de l'Amérique. Pour Transatlantique, l'historienne de l'art Fabienne Dumont réunit autour de cette œuvre incontournable sept regards d'artistes européennes.
« Dès la préface, le ton est donné ; présentée avec clarté, simplicité et sans emphase la trajectoire d'Alice Neel dans le XXe siècle parvient à mettre en avant les zones de réflexion et d'interrogations de son rapport à des concepts qui pourraient la définir. À l'image de ce féminisme comme horizon problématique d'une vie aussi libre que marquée par les ambiguïtés, dégageant alors la nécessité de se départir de toute appréciation morale venant au secours de la publicité d'un œuvre qui n'en a pourtant pas besoin. Et c'est toute la force de ce petit ouvrage, réunissant des paroles d'artistes autour d'une peinture qui les a influencées ou, au contraire, découverte par la suite et dont le magnétisme révèle les liens secrets de filiation. Dépourvue d'images, cette parole de peintres trouve paradoxalement un intérêt passionnant dans sa restriction aux mots, aux lettres, voire à la lettre. [...] Peu importent support et médium, les plasticiennes échangent ici avec toute leur singularité et une émotion sensible les possibles de la communication et les ramifications infinies de l'œuvre et, sans se concerter, dévoilent une communauté de regards qui passe immanquablement par l'attention essentielle au pluriel. »
Guillaume Benoit, Slash Paris
Fabienne Dumont est professeure d'histoire de l'art contemporain à l'université Jean-Monnet-Saint-Étienne et critique d'art, spécialiste des questions
féministes, de genre et queer articulées à une perspective culturelle, sociale et politique. Sa thèse est devenue un livre,
Des sorcières comme les autres – Artistes et féministes dans la France des années 1970 (PUR, 2014). Elle a édité l'anthologie
La rébellion du Deuxième Sexe – L'histoire de l'art au crible des théories féministes anglo-américaines (1970-2000) (Les presses du réel, 2011), la réédition de
Histoire de l'art et lutte des sexes de Françoise d'Eaubonne (Les presses du réel, 2025), et codirigé deux projets collectifs,
L'histoire n'est pas donnée – Art contemporain et postcolonialité en France (PUR, 2016) et
À l'Ouest toute ! Travailleuses de Bretagne et d'ailleurs (Les presses du réel, 2017). En 2019, deux ouvrages dont elle a signé les textes ont accompagné une rétrospective de
Nil Yalter au MAC VAL, dont elle était co-commissaire :
Nil Yalter – À la confluence des mémoires migrantes, féministes, ouvrières et des mythologies (MAC VAL) et
Nil Yalter – Entretien avec Fabienne Dumont (Manuella Éditions/Aware).
Née en 1900 à Merion Square, en Pennsylvanie, Alice Neel a vécu à Philadelphie et à La Havane avant de s'installer à New York (où elle a vécu jusqu'à sa mort en 1984), s'intégrant au milieu social du quartier de Harlem. Elle a peint de manière figurative tout au long de sa vie, utilisant souvent les personnes « autour d'elle » comme sujets, modèles et muses. Pour l'artiste, cela signifiait représenter à la fois les habitants de Harlem, mais aussi des inconnus, des amis et des intellectuels qui partageaient souvent sa proximité avec le Parti communiste. Peintre figurative à une époque dominée par l'expressionnisme abstrait, Neel a développé des manières remarquables et radicalement nouvelles de représenter le corps humain dans la peinture, comme dans ses célèbres nus de femmes enceintes. L'aspect introspectif de son œuvre, sa capacité à capturer l'essence de ses sujets et de leur âme même, font d'elle aujourd'hui l'une des artistes les plus respectées du XXe siècle.
L'œuvre d'Alice Neel a fait l'objet de rétrospectives au Metropolitan Museum of Art de New York, au Guggenheim Museum Bilbao et au Centre Pompidou à Paris. Elle fait partie des collections permanentes d'institutions telles que l'Art Institute of Chicago, le Hirshhorn Museum and Sculpture Garden à Washington, D.C., le Metropolitan Museum of Art, le Moderna Museet de Stockholm, le Museum of Contemporary Art de Los Angeles, le Museum of Fine Arts de Houston, le Museum of Modern Art de New York, la National Gallery of Art de Washington, D.C., le Philadelphia Museum of Art, la Tate Modern de Londres, le Walker Art Center de Minneapolis, Minnesota, et le Whitney Museum of American Art de New York.