En retraçant l'histoire de trois candélabres colossaux fabriqués par Piranèse (1720-1778) à partir de débris de sculptures romaines antiques, Caroline van Eck nous initie au trajet compliqué des objets d'art depuis leur production jusqu'à leur réception, et élargit l'horizon des études sur le néo-classicisme en expérimentant l'efficacité des méthodes anthropologiques, isolant ce qui relève de la marchandisation des objets d'art et de leur singularisation.
À la fin de sa vie
Giovanni Battista Piranesi a créé trois grands candélabres. Deux sont conservés à l'Ashmolean Museum d'Oxford et l'autre au Louvre. Bien qu'ils ont compté au nombre de ses œuvres les plus recherchées et les plus prestigieuses, atteignant des prix extrêmement élevés du vivant de leur auteur, l'intérêt porté à ces candélabres a connu un fort déclin dès les années 1820 et aujourd'hui encore, ils font partie de ses œuvres les moins étudiées.
Une biographie des candélabres est ici le point de départ d'une enquête sur l'intense investissement d'artistes, de mécènes, de collectionneurs et du public, autour de 1800, dans des objets qui faisaient revivre l'Antiquité gréco-romaine, par leur conception, leur style, leur présence ou ce que nous appellerions aujourd'hui leur agency ou matérialité. Il s'agit de comprendre comment ces objets donnaient à leurs créateurs ou à leur public le sentiment de retrouver la présence de l'Antiquité, voir les statues prendre vie sous leurs yeux. Caroline van Eck cherche à savoir quelles conditions étaient nécessaires pour produire de tels objets et le prix qu'il fallait payer pour les posséder, ainsi que les ramifications d'un attachement aussi intense, voire excessif, aux artefacts.
Ce livre entend donc de jeter un regard neuf sur ce qu'il est d'usage d'appeler le néoclassicisme et sur la culture néoclassique à partir d'une perspective différente, en choisissant de partir des objets eux-mêmes plutôt que des artistes, mécènes ou collectionneurs. Une grande partie du livre est centrée sur les candélabres de Piranèse ; mais il ne s'agit pas seulement ici d'un livre sur cet artiste. Écrire la biographie de ces candélabres et explorer les présupposés de leur conception et les réactions qu'ils ont suscitées nous permettra d'explorer deux questions plus larges : l'intrication mutuelle entre les hommes et les œuvres et l'émergence du néo-classicisme, considéré ici dans le contexte plus vaste de la survivance de la culture gréco-romaine.
Caroline van Eck est professeure d'Histoire de l'art à Cambridge. Elle a publié, entre autres, François Lemée et la statue de Louis XIV sur la Place des Victoires : les débuts d'une réflexion ethnographique et esthétique sur le fétichisme (Paris, 2013) et Art, Agency and Living Presence. From the Animated Image to the Excessive Object (Munich et Leiden, 2015). En 2016, elle a reçu le Grand Prix du Rayonnement de la Littérature et Culture Françaises de l'Académie française.
Titre original : Piranesi's Candelabra and the Presence of the Past, Oxford: Oxford University Press, 2023.
2026 (parution prévue au 1er trimestre)
édition française
17 x 24 cm (broché)
280 pages (ill.)
ISBN : 978-2-37896-493-1
EAN : 9782378964931
à paraître
