les presses du réel

Le narré des îles Schwitters

Patrick Beurard-Valdoye - Le narré des îles Schwitters
De la Norvège à l'Angleterre, une enquête sur l'exil du fondateur de Merz, Kurt Schwitters, à travers une Europe détruite par le nazisme. Le récit prend la forme d'une narration libre, empruntant à la poésie son autonomie et sa verticalité.
Patrick Beurard-Valdoye est un poète enquêteur : chacun de ses livres est le journal de bord d'une errance au cours de laquelle l'auteur s'immerge totalement dans un site et construit son récit à partir d'écoutes, de documents retrouvés, de paroles libérées… de ces informations éparses, il tire une substance en fonction du principe des coïncidences. Naît une écriture-mémoire, véritable créole beurardien où la langue charrie dialecte local, français actuel, et langue en devenir. Sont ici « narrés » l'errance et l'exil de l'artiste Kurt Schwitters à travers une Europe détruite par le nazisme. On connaît mal l'exil des Allemands qui, fuyant le nazisme, optèrent pour la Norvège, terre de paix. Des peintres, sculpteurs (Ernst Müller-Blensdorf), écrivains, thérapeutes (Wilhelm Reich), des acteurs politiques (Willy Brandt). Dès l'invasion allemande, l'exode reprend. Se regroupent quelques réfugiés au nord de la Norvège qui traversent en Angleterre. Ils espèrent y trouver la liberté, ils connaîtront la captivité. Kurt Schwitters demeure interné sur l'île de Man dix-sept mois. Puis Londres sous les bombes ; il s'installe alors dans un village, berceau du romantisme anglais. L'île aux morts n'est pas loin. Le spectre du prix Nobel de la paix Fridtjof Nansen (explorateur, fondateur du Haut Commissariat aux Réfugiés) erre en filigrane.
Ni fiction, ni récit, ni essai biographique : le narré. Le narré comme instrument singulier susceptible d'arracher l'écriture au référent d'archive ou d'enquête — les fondements de l'ouvrage – pour lui conférer l'autonomie et la verticalité du poème : en prose, en prose cadencée, en versets, jusqu'au poème visuel. Le narré, de forme sans cesse mouvante, exprime la conscience du dire durant la réclusion, et sa mémoire.
Une île sait être refuge : destinée à l'utopie, elle est donc une station intermédiaire entre le possible et l'impossible. Mais une île peut avoir vocation d'enfermement. Cela dépend de la qualité du cordon ombilical qui la relie à son époque continentale. Ici les îles ne sont pas désertes. Elles naissent autant de l'art que du vécu de Kurt Schwitters en exil.
Et pourquoi Kurt Schwitters ? Parce que ses Merzbauten, comme son œuvre littéraire (spécialement son Ursonate) anticipent notre présent artistique. Enfin parce que son œuvre comme son attitude représentent un modèle face à toute société en banqueroute culturelle.
Né en 1955 dans le Territoire de Belfort, au bord de la Savoureuse, Patrick Beurard-Valdoye vit le plus souvent à Paris. L'élaboration de ses livres l'amène toutefois à une forme de nomadisme. Lors d'un séjour en Irlande en 1974 il décide de se consacrer aux arts poétiques. Dans les années 1980, il dirige les Cahiers de Leçons de Choses, revue d'arts expérimentale (arts poétiques, arts plastiques, musique contemporaine) remarquée notamment par John Cage. À la suite d'un séjour à Berlin en 1982, il entreprend « Le cycle des exils », ensemble de livres « qui enchevêtrent les strates d'une Histoire de l'Europe, et plus particulièrement celle des rapports franco-allemands » (Emmanuel Laugier, Le Matricule des Anges).
Il a donné une centaine de récitals et performances dans une douzaine de pays. Deux CD audio Flux (Son@rt, 2002) et Schwitters du Nord à la mort (Hôtel Beury, centre d'art et de littérature de l'Échelle, 2007) reprennent quelques uns de ses récitals. Ses textes sont traduits et publiés dans une dizaine de langues. Le numéro 17 de la revue Il Particolare consacre un dossier à son travail (premier trimestre 2008). Son activité de poète, exercée à temps plein, s'est souvent prolongée dans l'organisation de manifestations artistiques (fondateur de l'Écrit-Parade qu'il dirigea jusqu'en fin 1999) ; la coordination de dossiers de revues (il a dirigé le premier dossier consacré à Ghérasim Luca pour la revue Java) ; l'enseignement artistique (l'École nationale des Beaux-Arts de Lyon, où il conduit un atelier d'arts poétiques) et dans des études sur les arts plastiques (notamment sur Joseph Beuys, sur le peintre Rupprecht Geiger ou sur François Dufrêne).
 
paru en octobre 2007
édition française
15 x 21 cm (broché)
320 pages
 
25.40
 
ISBN : 978-2-84761-962-1
EAN : 9782847619621
 
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