les presses du réel

Hommage à Grandville

extrait
L'évocation de la présence de Pasteur au musée de Dole, ou de Buffon au musée deMontbard, ont été prétexte pour inviter Christiane Geoffroy à présenter son travail, mettant ainsi en parallèle les hommes de science et une réflexion artistique sur la science et les images.
A Nancy, à l'occasion du bicentenaire de la naissance de JJ. Grandville (1803-1847), Christiane Geoffroy est maintenant sollicitée pour porter un regard contemporain sur l'un des ouvrages majeurs du grand dessinateur, Les Métamorphoses du jour (1929) dans lequel les animaux remplacent les humains.

Le thème de la métamorphose est vieux comme le monde. Après les Egyptiens et leurs dieux à tête animale, chat, taureau, faucon, Ovide donna tant de thèmes d'illustration aux artistes, qu'il reste encore aujourd'hui source d'inspiration. Si les fables d'Esope ou de la Fontaine ont été les ouvrages de réféence littéraire de Grandville, pour les dessins, l'artiste a avoué lui-même à Paul Lacroix : "Je n'ai vu les animaux que dans Buffon, c'est là que je les étudie". Sans doute connaissait-il également les travaux de Charles Le Brun ainsi que les Caprices de Goya. Les traités de physiognomie animale existent depuis l'antiquité et les études sur le comportement animal ont toujours eu un grand succès public. En effet, le pouvoir des faux-semblants, la fascination que provoque l'homothétie entre le faciès humain ou animal en fonction des différents types de caractère, donnent aux Métamorphoses du jour une actualité toujours compréhensible pour le lecteur du XXIe siècle.

Plutôt qu'un commentaire littéral de l'oeuvre de J.J. Grandville, Christiane Geoffroy a choisi, au sein de son travail, de privilégier les oeuvres en liaison directe avec l'éthologie, science du comportement animal dans son milieu naturel, qui fait intervenir dans l'analyse des différentes fonctions une mise en parallèle avec les attitudes humaines. A partir d'images tirées de publications de vulgarisation, l'artiste nous propse une lecture des attitudes animales,qui ne sont pas sans rappeler le travail de Grandville ; en effet, le thème des métamorphoses fait de l'artiste un magicien qui transforme le monde et en propose une nouvelle lecture où l'animal devient doté de pensées, de sentiments et même peut-être d'âme. Sans commentaires moralisants, les images de Christiane Geoffroy sont proposées à notre regard, laissant à chacun le soin de les interpréter en fonction de sa propre culture et de son histoire.

Afin de rappeler que le monde végétal, animal et humain est issu d'une même cellule initiale, Christiane Geoffroy a conçu un environnement qui a pour objet de plonger le visiteur dans le liquide primordial. L'origine du vivant est une peinture murale, recouvrant les quatre murs de la salle, où sont reproduites les cellules primitives, origine de la vie. Retrouvant ainsi les théories de Geoffroy Saint-Hilaire, professeur de zoologie au Muséum de Paris au début du XIXe siècle qui affirmait que "tous les animaux et l'homme lui-même sont faits su le même modèle anatomique. Seuls les accessoires varient", l'artiste actualise le propos en nous présentant les recherches les plus récentes en matière de zoologie.

La vidéo et la photographie permettent un travail métaphorique sur le réel. Ainsi, Christiane Geoffroy n'utilise pas la lanterne magique que J.J. Gradville dessine sur la couverture des Métamorphoses du jour pour présenter les différents carcatères des animaux mais l'appareil photographique numérique. Suivant pendant un an les jeux entre sa fille et son chien, l'artiste met en scène les attitudes et humeurs de chacun des protagonistes. Y a-t-il homothétie entre les sentilents humains et les attitudes canines ? Comment interpréter ce qui semble un sourire chez le chien ?

La position originale de Christiane Geoffroy sur la scène artistique, par son intérêt pour la biologie et les sciences de la vie, trouve dans son dialogue avec l'oeuvre de J.J Grandville une pertinence toute particulière.En effet, nous portons à l'imagerie médicale et scientifique un regard curieux et attentif mais souvent toalement détaché du monde artistique. La tradition de la métamorphose dans le champ plastique nous permet de relire l'oeuvre de Christiane Geoffroy tout en lui conservant son actualité. L'ambiguité entre un mur de celluls et une peinture murale abstraite reste entière. Les images d'animaux ayant des postures ou attitudes "humaines" sont lues, en l'absence de tout commentaire, comme des allégories des entiments plutôt que comme des objets d'études scientifiques sur le comportement animal. Les travaux de Christiane Geoffroy utilisant les matériaux et les figures traditionnelles de l'art, mais se situant dans le champ de la science, proposent une approche différente et originale du monde.

De la métamorphose
Blandine Chavanne
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