les presses du réel

The Drawer n° 02 – La Métamorphose

extrait
Abracadabra
(p. 5)



Après le chaplinien Les Temps modernes, The Drawer a donc choisi pour son volume 2 le thème de La Métamorphose, titre du roman le plus célèbre de Franz Kafka, lu par tous au moins une fois et dont peu se souviennent avec précision.
L'histoire d'un homme qui se lève un matin dans la peau d'un insecte. C'est sans doute la raison pour laquelle de nombreux animaux figurent dans les pages de ce numéro : oiseaux, tapir, bichon, limaces, escargot, papillon, chouettes, pigeon. Cela explique moins clairement la présence d'une carotte. Cela justifie en tout cas le fait d'y voir des formes abstraites ou non, humaines, animales ou végétales se déployer, se replier, muter, se déplier, changer, se transformer, évoluer, vivre. Avant, pendant et/ou après métamorphose. Des formes et des dessins souvent étranges, hybrides voire évidemment kafkaïens, melting-pot de signes, de codes et d'images tenus d'habitude éloignés.
Pourquoi ce thème ? Pour son envergure bien sûr et pour la richesse de sens, d'images et de représentations qu'il charrie, aussi.
La métamorphose est une idée, un concept, une action, un processus, à la vitesse aussi infinie que variable. Les façons de l'envisager sont multiples. Et tout aussi intéressants les résultats qu'elles produisent.Pour sa proximité avec le champ de l'art ensuite. Le thème de la métamorphose est au cœur de la démarche, du projet, de la pensée, du travail, voire des œuvres, de nombreux artistes. Fil rouge chez certains, axe de travail et de recherche pour d'autres, clé de lecture possible de certaines œuvres enfin. Sans en être forcément la raison.
D'une idée à sa concrétisation et à sa mise en forme sur le papier, la métamorphose est également très liée au dessin lui-même, à sa pratique. En particulier quand on utilise du sang pour sa mise en couleur, comme la jeune et talentueuse Mélanie Delattre-Vogt.
C'est aussi et enfin parce que la métamorphose est un des nombreux miracles rendus possibles par le dessin. Qui n'a jamais rêvé de se retrouver dans la peau d'un autre, de changer les choses ou les êtres qui l'entourent ? Le dessin peut, lui, le permettre, comme le confirme le non moins génial Gilles Barbier. À la question « Qu'apporte le dessin ? », il répond : « la possibilité inouïe de se réincarner (pour rire) en taupe, en fourmi, en oiseau (pigeon ?), corail, arbre, moine, tube digestif… ». C'est le pouvoir, le plaisir et la force du dessin.

Barbara Soyer & Sophie Toulouse


 haut de page